Histoire et émaux.
MINO-YAKI 美濃焼
C’est au XVIe siècle pendant une violente période de guerres féodales que la céramique de Mino (Mino-yaki) se développa et acquit sa réputation, portée par la cérémonie du thé (Chanoyu 茶の湯 )
Depuis, ses styles se sont transmis aux époques suivantes et elle s’est popularisée au point d’apparaître aujourd’hui comme synonyme d’un art de la table d’usage quotidien.De nombreux jeunes céramistes perpétuent avec beaucoup d’originalité son esthétique libre et dynamique, toujours très prisée.
Partons à la découverte du Mino-yaki, un artisanat traditionnel dont la fascination par-delà les époques et les générations explique les liens si profonds et si étendus qu’il entretient avec l’art de vivre japonais.
L’industrie de la céramique y est active depuis des temps très anciens :
son origine remonte à l’introduction de la technique des grès coréens autour du Ve siècle. Mais c’est la mode de la cérémonie du thé dans la région du Kansai, centre politique, économique et culturel pendant la seconde moitié du XVIe siècle qui fait véritablement prospérer le Mino-yaki, en particulier ses bols de thé,
Généralement,lorsqu’on parle de céramique, le nom de la région d’origine suffit pour définir un certain type de couleurs et de glaçures, une qualité spécifique de texture. La plupart des émaux japonais sont préparés à base de cendre provenant de la végétation locale. Quelques uns sont très originaux et restent très prisés à travers le temps.
LE SHINO 志野
Le premier émail blanc à haute-température (env.1300°) au Japon. Alors que la plupart des décorations avant cette époque étaient gravées, incisées ou appliquées, la technique du shino utilise, quant à elle, une brosse à l’oxyde de fer conférant à son décor un aspect contrasté.
Une marque distinctive est sa texture composée de petits trous d’aiguille appelés «suana» ou «yuzu-hada» (peau de yuzu) Le Shino est caractérisé par la douceur de ses formes et de ses couleurs. C’est une céramique blanche à glaçure laiteuse due à la présence de cendre et de feldspath dans la composition.
LE SETOGURO 瀬戸黒
Le Setoguro (« Seto noir »)a été créé pour répondre spécifiquement à la demande de Sen no Rikyû (1522-1591), le célèbre maître de thé, pour des bols de forme cylindrique. De ce fait, les œuvres désignées sous la dénomination Setoguro sont presque exclusivement des bols à thé pour la cérémonie du thé. Leur forme extrêmement simple, leur couleur noire unie exprime la recherche de l’esprit wabi de la cérémonie du thé selon Rikyû. Ce noir est obtenu par un retrait de la pièce du four et un refroidissement rapide alors que la glaçure est encore en fusion. On lui donne le nom de Hikidashi-guro, ou « noir de retrait ».
L’ORIBE 織部
Le style Oribe exprime une esthétique à la fois libre et moderne qui en fait l’un des styles de poterie japonaise les plus populaires encore aujourd’hui. Il fut élaboré sur la base des conceptions développées par Furuta Oribe (1543-1615), le principal disciple de Sen no Rikyû, Maître de thé. La spécificité de l’Oribe-yaki réside dans la vitalité qui émane des formes asymétriques, comme la forme kutsugata (en forme de vieille « espadrille » affaissée) et la forme éventail. Les objets sont émaillés d’une glaçure verte translucide et les motifs sont peints.
LE KI-SETO 黄瀬戸
Comme son nom l’indique(Seto jaune) ,sa caractéristique principale réside dans sa glaçure jaune pâle, très peu brillante : Aburage-de (tofu frit)
Ayame-de sont des vaisselles avec des motifs en forme d’iris. D’autres sont en fleur de prunier, radis, navet ou chrysanthème. Un autre type, Guinomi-de sont des verres à saké de forme hexagonale: beaucoup de vaisselle de ce premier type de Ki-Seto ont été retrouvées par Kato Tokuro autour du four de Kamashita ( four de ki-seto le plus connu de l’époque Momoyama ).
Kitaoji ROSANJIN 北大路魯山人
L’inventeur de la notion de «gastronomie japonaise», Rosanjin (1883-1959) a donné une nouvelle acception au mot bi-shoku («l’esthétique du manger»), équivalent à notre notion de gastronomie. Le mot existait déjà, mais il l’a mis en pratique et a ainsi donné une nouvelle vie à ce concept : «le beau autour de la table».
À la fois céramiste, artiste laqueur, calligraphe et peintre, dont les œuvres sont aujourd’hui encore hautement appréciées, il était lui-même excellent cuisinier. Également essayiste, il écrivit notamment sur l’art de la céramique et la cuisine. En fait, tout son art tournait autour de la table.
Promoteur de ce nouvel «Art total» , organisateur du «Club des gourmets» et de plusieurs restaurants, dont le plus célèbre, «Hoshi ga oka saryô»
星ヶ岡茶寮, séduisait la plus haute sphère des esthètes japonais, Rosanjin concevait lui-même les espaces de ses restaurants, décorant les murs de ses peintures et calligraphies, établissant les menus, dessinant même les couverts des repas.
La cuisine japonaise s’est toujours inspirée de la beauté de la nature, mais Rosanjin a su exprimer cette philosophie avec l’intensité d’un grand artiste. D’une part par les motifs tirés de la nature présents dans ses céramiques, et d’autre part, par l’importance de «manger nature» qu’il défendait dans ses écrits.
“La Cuisine, tout en prenant comme matière la nature et en satisfaisant le désir le plus primitif des être humains, sublime ce savoir-faire au niveau de l’art. “
© rakudo.fr 2016 photos JM et K. Sakakura